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La mort de Michel Blanc, le M. Tout-le-Monde du cinéma français

L’acteur comique aura beau prendre sur lui toutes les maladresses, endosser tous les ridicules de ses contemporains, il lui restera toujours une forme de grandeur non négociable : celle de tendre un reflet à la banalité, d’accueillir en lui la médiocrité qui nous traverse tous et, probablement, nous réunit. Tel fut en tout cas l’apport de Michel Blanc, comédien populaire, qui aura donné corps à M. Tout-le-Monde et sera parvenu à humaniser au-delà de toute attente cette vague statistique qu’est le Français moyen, en le rendant drôle, tout en faisant sentir en filigrane une note plus douloureuse, l’échec du galérien, la détresse du perdant, une forme assez poignante de dépression. Sa petite taille, sa calvitie longtemps contrecarrée par une moustache, ses yeux de chien battu, qui auraient pu passer pour des désavantages, il les a inscrits dans la légende de l’ordinaire, convertis en archétype franchouillard, avec une pointe de méchanceté et beaucoup de tendresse.
Venu de l’école du café-théâtre, formé dans les rangs de la troupe du Splendid, qui a régné sans partage sur le rire français durant des décennies, il a conquis la notoriété grâce à l’inénarrable personnage de Jean-Claude Dusse dans la série des Bronzés, de Patrice Leconte, gringalet en club de vacances prenant râteau sur râteau. Il fut aussi ce « pauvre type » auquel le costaud Gérard Depardieu glissait des mots doux, et qu’il amenait à se travestir, dans Tenue de soirée (1986), de Bertrand Blier, qui amorçait le virage dramatique de l’acteur et lui valut un prix d’interprétation au Festival de Cannes. Michel Blanc est également, et sporadiquement, passé à la réalisation pour une petite demi-dizaine de films, de Marche à l’ombre (1984) à Voyez comme on danse (2018), sans y lâcher ses prérogatives de jeu. Il est mort sur son lit d’hôpital à Paris, dans la nuit du 3 au 4 octobre, des suites d’un malaise cardiaque à l’âge de 72 ans.
Michel Blanc naît, le 16 avril 1952, à Courbevoie (Seine), d’un père déclarant en douane et d’une mère dactylo qui forment un foyer typique de la classe moyenne émergente. Il grandit dans la banlieue ouvrière de Puteaux, entre le pavillon deux-pièces-cuisine de ses parents, bientôt repoussés à Colombes par le grand chantier de bétonnisation de La Défense, et la boutique d’horlogerie de ses grands-parents – un paysage en voie d’urbanisation qui débouche encore sur des terrains vagues et des amorces de ruralité. Fils unique, l’enfant souffrait d’un souffle au cœur, et de cette vulnérabilité physique sortiront certains traits de son personnage comique, volontiers bilieux, craintif ou nosophobe.
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